M. le Député Carlo Di Antonio (cdH).

J'appelle l'attention de Monsieur le Ministre sur le développement des agro-carburants de deuxième génération.

Le bioéthanol de deuxième génération est fabriqué à base de déchets végétaux cellulosiques, tels que la paille, les épis de maïs, le miscanthus, la bagasse de canne à sucre (résidu fibreux), au lieu d'utiliser des cultures alimentaires telles que le maïs comme le faisaient les agro-carburants de première génération.

Une récente étude affirme qu'il serait possible à l'horizon 2020 de collecter en Europe entre 225 et 270 millions de tonnes de biomasse issues essentiellement des résidus de récoltes de céréales ou de betterave et marginalement de l'exploitation des forêts et de la valorisation des déchets organiques communaux.

À partir de cette collecte, à organiser ou à développer, il serait possible de produire annuellement entre 75 et 90 milliards de litres d'éthanol sur la base d'un taux de conversion qui atteindrait à cette époque (2020) les 350 litres par tonne de biomasse sèche. Ces volumes représentent en unité pétrolière entre 1,29 million et 1,55 million de barils par jour d'éthanol. Pour mémoire, les pays de l'OCDE Europe consomment en 2010 dans les 14 millions de barils par jour de produits pétroliers.

Ce sont donc quelque 10 % en volume des produits pétroliers consommés aujourd'hui en Europe qui sont concernés par ce scénario.

A l'instar des biocarburants de première génération, le bioéthanol de deuxième génération peut être mélangé avec de l'essence pour faire rouler les voitures et aider à atteindre les objectifs en matière d'énergies propres.

Les Etats-Unis vont démarrer dès 2012 la production industrielle de ces biocarburants de seconde génération, qui valorise l'ensemble de la plante et n'entrent pas en compétition avec les productions alimentaires.

En France, les biocarburants de première génération (éthanol et biodiesel) pourraient représenter jusqu'à 4 millions tep en 2020, soit environ 10 % d'incorporation à cet horizon.

Quels sont les chiffres pour la Belgique et plus particulièrement pour notre Région?

Compte tenu de notre potentiel de biomasse exploitable, Monsieur le Ministre pourrait-il m'indiquer quelles sont les initiatives prises par la Région wallonne pour favoriser l'émergence rapide d'une véritable filière industrielle de production d'agro-carburants de deuxième voire de troisième génération produite à partir de déchets et résidus issus de la biomasse en respect des critères sociaux et environnementaux.

Réponse de M. JM NOLLET, Ministre du Développement Durable et de la Fonction Publique.

Le Plan National belge en matière d'énergies renouvelables prévoit, à l'horizon 2020, une consommation de 789,14 ktep de biocarburants essentiellement de première génération. La manière dont l'apport des carburants à base de renouvelables sera considéré dans les objectifs des différentes entités fédérale et régionales, doit encore faire l'objet de négociations dans le cadre du partage de l'effort du paquet énergie-climat. Toutefois, à travers l'avant-projet d'arrêté visant la fixation des quotas de certificats verts, le Gouvernement wallon a précisé que l'apport de la part de l'énergie renouvelable dans le transport qui reviendra à la Wallonie est intégré dans l'objectif de tendre à 20% d'énergie renouvelable.

De manière générale, il convient de rappeler de manière synthétique les 3 générations de biocarburants. La première génération, également dénommée agro-carburants, consiste en des carburants produits essentiellement à partir de produits de l'agriculture (blé, betterave, colza, ... ). La deuxième génération vise principalement les biocarburants produits à partir de matière lignocellulosique (plante entière). La troisième génération est un terme utilisé parfois pour désigner les biocarburants produits à partir d'algues. Pour simplifier, on dit parfois biocarburant conventionnel (bioéthanol/biodiesel de première génération) et biocarburants non-conventionnels pour tous les autres.

Les biocarburants de deuxième génération et de troisième génération, sont à des stades différents de développement. D'après le récent rapport spécifique du GIEC sur les énergies renouvelables, les biocarburants de deuxième génération (ligno-cellulosiques) sont à un stade pré-commercial dans certains pays. Les biocarburants de troisième génération (algues et autres procédés biologiques) en sont encore en phase de recherche et développement. L'état de l'art sur les algues montre une large immaturité des technologies, les recherches concernant les process sont en effet encore balbutiantes dans certaines étapes cruciales (extraction des huiles, cultures en milieux fermés, e.a.).

Deux projets de recherche sur les biocarburants sont en cours en Région wallonne, il s'agit de:

  • LlGNOFUEL, qui vise au développement d'une filière intégrée pour la production de biocarburants de 2ème génération à partir de lignocelluloses. Le projet a démarré le 1er janvier 2008 et la clôture est prévue le 31 décembre 2011. Le budget global de ce projet est de 1 357 880 euros.
  • FUNGERGY, qui propose une meilleure autonomie énergétique des bâtiments grâce aux déchets, en particulier la digestion fongique pour une solution sans résidus. Le projet a démarré le 1er janvier 2007 et s'est clôturé le 31 décembre 2010. Le budget global de ce projet est de 280 455 euros.

L'essentiel est de favoriser les biocarburants qui présentent la meilleure performance environnementale en termes de réduction des émissions de CO2 et de respect des critères de durabilité plutôt que de se baser sur des « types» de biocarburants et c'est pourquoi une série de garde-fous ont été instaurés dans la directive énergies renouvelables, y compris par rapport à la disponibilité et au prix des matières premières agricoles.

Afin de respecter les critères sociaux et environnementaux, la Directive 2009/28 met en place un système de critères de durabilité pour les biocarburants et les bioliquides. Le volet relatif aux biocarburants relève des compétences fédérales, un Arrêté royal est d'ailleurs en préparation afin de transposer en droit belge les dispositions prévues par la Directive. Le volet bioliquides relève des compétences régionales, la transposition est également en préparation au moyen d'un projet d'arrêté du Gouvernement wallon modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 novembre 2006 relatif à la promotion de l'électricité produite au moyen de sources d'énergie renouvelable ou de cogénération.

Ces deux projets d'arrêtés reprennent les dispositions prévues par la Directive, c'est-à-dire, dans les grandes lignes, que les biocarburants et bioliquides devront permettre une réduction d'émission de CO2 de minimum 35% puis, à partir de 2017, de minimum 50% pour les installations existantes et 60% pour les nouvelles installations. Ces réductions d'émissions devront être prouvées par une analyse de cycle de vie et en comparaison avec les carburants fossiles.