C. Di Antonio (cdH).

Notre Région connaît un gros problème d'inadéquation entre l'offre et la demande d'emploi sur le marché du travail : en effet, les besoins des employeurs (savoir être, savoir faire) ne sont pas toujours rencontrés à la hauteur de leurs attentes.

Il est évident que même si l'objectif n'est pas de répondre de manière unilatérale à ces demandes (besoin de concertation, de réciprocité, diminution du nombre d'offres d'emplois et notamment des offres d'emploi raisonnables), il est essentiel d'accroître les possibilités d'accès à la formation professionnelle tout en maintenant une réelle qualité de celle-ci.

Les opérateurs de formation parapublics et associatifs interviennent en région wallonne de façon complémentaire grâce au DIISP ; ces collaborations, quand elles sont effectives, permettent aux demandeurs d'emploi d'optimaliser leur parcours d'insertion.

Toutefois, on remarque qu'une disharmonie financière persistante entame l'efficience et l'efficacité des interventions des opérateurs sur le parcours d'insertion des demandeurs d'emploi

Concernant le secteur associatif et plus particulièrement les EFT-OISP, le Décret du 1er avril 2004 a permis une structuration et une stabilisation de leurs actions en établissant des règles financières claires.

Cependant, la dotation globale est restée insuffisante et cela génère des conséquences budgétaires dommageables pour encore une trop grosse partie de ces opérateurs de formation.

Ces derniers font alors appel à des financements complémentaires pour venir compenser le déficit structurel. Ceci est tout simplement contreproductif et va à l'encontre des objectifs de formation :

Les priorités financières prédominent sur les priorités de formation et de réinsertion

La qualité des formations proposée est inévitablement touchée : les équipes sont censées arriver au même résultat avec moins de moyens (humains / budgétaires). A moins de témérité hors du commun et d'engagement total, il est difficile de poursuivre sur cette voie d'année en année.

La situation de dépendance de ces moyens conjoncturels met en jeu l'indépendance financière du secteur à peine gagnée grâce au Décret. Sur ce point, on peut alors raisonnablement se poser la question de la réelle volonté de nos représentants politiques de donner une indépendance à ce secteur.

Sur ce point, il apparait encore difficile de comprendre pourquoi et comment le Gouvernement finance des actions ponctuelles de formation alors que le financement structurel total n'est toujours pas atteint.

Certes, une ouverture des appels à projets tels que les appels à projet PAC permet sans commune mesure de faire appel à la créativité de l'ensemble des opérateurs de formation.

Cependant, la distorsion générée est de taille : ce système permet à des opérateurs privés - comme les agences d'intérim - de proposer des modules de formation au même titre que les EFT/OISP. Faut-il rappeler encore ici que les objectifs de ces différents opérateurs ne sont pas les mêmes et pourraient même être opposables ?

La concurrence est un bénéfice pour les différentes parties (tout opérateurs de formation confondus et demandeurs d'emploi) quand elle est réalisée dans des conditions pures et parfaites(1) ou approchantes.

Or, ici, les appels à projets qui permettent aux EFT-OISP de panser les manquements d'un financement structurel sont gérés par le Forem - censé être un partenaire de formation - mettent en concurrence des opérateurs à objectifs aussi divers que variés (les publics des EFT et OISP divergent des publics des agences d'intérim, les EFT-OISP insèrent tant socialement que professionnellement les demandeurs d'emploi sur le marché du travail(2), les agences d'intérim se spécialisant dans l'insertion professionnelle) et couvrent un nombre d'heure réduit qui doit venir en complément des heures de formation du centre (ces appels à projets mobilisent du temps pour les centres, il demande de libérer du personnel pour assurer l'encadrement ou de procéder à des engagements).

La conclusion d'une concurrence imparfaite est évidente(3), cela en plus du constat d'un manquement du Gouvernement du financement à 100% de l'ensemble des heures de formation du secteur des EFT-OISP.

Afin de mettre un terme à la course infernale au financement, coûteuse en temps et en énergie, ne pourrait-on pas envisager de verser directement les fonds octroyés aux EFT-OISP via les appels à projets sous forme de subsides structurels ?

Si malheureusement cette proposition ne pouvait pas trouver d'effectivité immédiate, nous aimerions aborder un autre point équivoque: le secteur ne participe pas aux réunions de concertation visant à établir le cahier des charges de ces appels à projets.

Certes, pour les appels à projet pénuries, l'Interfédération des EFT-OISP est invitée au Comité de sélection des projets, ce qui est un premier pas mais elle ne participe pas à la rédaction du cahier des charges de ces projets ni au comité de décision.

Ceci ne lui permet pas de discuter ou de négocier les termes du partenariat (pourtant essentiel dans le cadre du DIISP) ou les modalités de l'appel à projets (nombre d'heures, secteur d'activités, mode d'intervention, type de public, analyse des pénuries?).

Est-il dès lors envisageable de remédier à ce dysfonctionnement et de permettre un partenariat plus effectif ? Serait-il possible d'intégrer une concertation préalable ?

_ (1) Pour rappel, les 5 conditions cumulatives de la Concurrence pure et parfaite sont l'atomicité du marché, l'homogénéité du produit, la libre entrée sur le marché, la transparence du marché et la mobilité des facteurs de production. (2) La raison d'être du secteur est de remettre à l'emploi des personnes qui en sont très éloignées par le biais d'une pédagogie différenciée, adaptée aux besoins de chacun. (3) Une partie des opérateurs peut influencer le marché de part sa spécialisation, le produit (module de formation) ne peut pas être homogène étant donné les finalités divergentes des opérateurs.

M. le Ministre M. Tarabella.

En 2001, les moyens consacrés aux EFT et OISP sur le budget ordinaire de la Région s'élevaient à 4 millions d'euros. En 2008, ce budget s'élevait à 27,6 millions d'euros; il s'agit là d'une évolution qui n'a pas d'équivalent dans les compétences de la Région wallonne.

Bien entendu, ce montant comprend les 11,3 millions d'euros que les EFT et OISP allaient chercher structurellement auprès du Fonds Social Européen. Mais cette reprise des montants par la Région wallonne est loin d'être anecdotique puisque, outre la limitation des démarches administratives et des retards de paiement inhérents aux projets européens, cette opération a permis de ne pas faire peser sur les EFT et les OISP la réduction des moyens européens pour la programmation 2007-2012 ainsi que les nouvelles exigences de l'Europe en matière d'éligibilité des projets.

Cela a permis, de plus, de bénéficier de moyens supplémentaires pour le lancement de nouvelles filières ou de projets innovants qui ont déjà profité à une dizaine de centres, suite au premier appel. Encore une fois, aucun autre secteur n'a bénéficié d'une mesure similaire en Région wallonne, en Communauté française, ni même à Bruxelles.

Pour 2009, le Gouvernement vient de consacrer des moyens supplémentaires pour assurer l'indexation et le phasage ainsi que pour tenir compte de demandes de nouvelles filières ou nouveaux centres, ce qui amène le budget global pour les EFT et OISP à un peu plus de 30 millions d'euros, auxquelles viennent s'ajouter les 904.000 euros de l'Accord non marchand 2007-2009. Je ne peux m'empêcher de voir dans cette énumération de chiffres la plus belle démonstration que le Gouvernement wallon a réservé sa plus grande attention au secteur des EFT et OISP et a respecté ses engagements en les traduisant en augmentations budgétaires conséquentes. J'ose espérer qu'il en sera de même pour les années à venir.

Quant aux fonds octroyés via les appels à projets (Pénuries et PAC/CNE), ceux-ci permettent une meilleure réactivité par rapport aux pénuries et aux besoins du marché de l'emploi. Ils sont de bons moyens pour un opérateur de tester la pertinence d'une nouvelle formation. Les englober dans le subside structurel du secteur EFT/OISP n'aiderait, donc en rien, la créativité et la pertinence des opérateurs.

Ainsi, les appels PAC/CNE sont des appels à destination de l'ensemble des opérateurs privés et publics, il ne serait donc pas normal de privilégier un type d'opérateur plus qu'un autre. J'ajouterai à cela, que ce type d'appel n'est pas à analyser comme une concurrence mais plutôt comme un complément d'offre de formation.

Les appels pénuries, quant à eux, sont pilotés par le Forem en tant qu'opérateur régisseur/ensemblier dans le cadre du DIISP (Dispositif intégré d'insertion socioprofessionnel). Une partie des missions sont confiées au secteur des EFT et OISP avec une participation au comité de sélection. En espérant avoir répondu à vos interrogations.