M. Carlo Di Antonio (cdH).

Monsieur le ministre, Pour mener un projet d’immersion dans ma commune, j’ai rencontré quelques difficultés. L’enseignement par immersion connait, semble-t-il, davantage de succès même s’il est, je le crains, inégalement réparti en Communauté française. Je connais relativement peu de projets en province de Hainaut. Confirmez-vous ce sentiment ? L’augmentation est-elle la même en Wallonie et à Bruxelles ? Disposez-vous de données chiffrées, principalement pour l’enseignement fondamental ? Dans ma commune, nous avons tenté de lancer un projet d’immersion en néerlandais. Faute de professeurs, il a dû être abandonné assez rapidement. Pour l’anglais, nous y sommes parvenus. Le projet fonctionne depuis deux ans mais les difficultés sont réelles. Si le Shape ne se trouvait pas à proximité, je pense que nous n’aurions pas trouvé d’enseignants. Frameries, une commune voisine, a voulu lancer un projet d’immersion en néerlandais à la rentrée de septembre mais le même problème s’est posé. Faute de professeurs munis des titres requis, la commune a dû reporter son projet à l’année prochaine. Le problème des infrastructures qui se pose également trouve souvent une solution dans la commune, ce qui n’est pas le cas pour la recherche, toujours plus difficile, des professeurs porteurs du diplôme requis. Interrogé sur le sujet voici quelques mois, vous aviez répondu que vous étiez en contact avec votre collègue du gouvernement flamand, en vue de réaliser un accord de coopération pour permettre l’échange d’enseignants. Ces contacts ont-ils abouti ? Nous sommes également confrontés au problème des barèmes des professeurs qui ne possèdent pas le titre requis. C’est vrai pour toutes les disciplines mais avec la pénurie que nous rencontrons dans le cadre de l’immersion, c’est particulièrement crucial.

À ce titre, les communes qui font l’objet d’un plan de gestion du CRAC – Centre régional d’aide aux communes – ne peuvent pas engager d’enseignants sur leurs fonds propres, ce qui pose souvent problème. Ainsi, dans l’arrondissement de Mons, les huit communes qui sont dans ce cas ne peuvent compléter leur enseignement en immersion. Elles sont de facto exclues de ces projets.

M. Christian Dupont, ministre de l’Enseignement obligatoire.

Pour ce qui est du succès de l’immersion, en 2007-2008, le nombre d’écoles concernées s’élevait à 171 ; il est de 195 pour 2008-2009. Pour l’enseignement fondamental, le nombre d’écoles en immersion est de 126, soit 13 de plus. Bruxelles comptait, en 2007-2008, 18 écoles en immersion, 7 dans le fondamental et 11 dans le secondaire ; en 2008-2009, les chiffres sont de 21 : 8 écoles fondamentales et 13 écoles secondaires. Le nombre d’élèves en immersion dans le fondamental atteindrait 12 301 élèves cette année.

On constate donc une progression. Néanmoins, pour les raisons que vous avez évoquées, je pense que nous devrions veiller à renforcer le phénomène. La limite de l’immersion, c’est le moment où l’on ne trouve plus de professeurs native speakers. La proximité géographique avec le Shape permet à votre région d’être relativement privilégiée. D’autres régions, proches de la frontière linguistique, bénéficient également de plus grandes possibilités pour le néerlandais. Ailleurs, c’est plus difficile et la limite est sans doute atteinte. Nous lancerons un appel via le site « enseignement. be » et les associations de professeurs anglais et américains. Notre volonté est bien réelle, mais si l’on veut maintenir la qualité des projets, il faut surtout veiller à la qualité de l’encadrement. Nous avons signé un accord de coopération avec M. Paasch pour l’échange d’enseignants avec la Communauté germanophone. L’accord conclu avec M. Vandenbroucke porte sur l’échange d’enseignants entre quarante écoles, francophones et néerlandophones. Nous avons visité en Région bruxelloise plusieurs projets qui fonctionnent bien. Mais nous en sommes au début de l’expérience et nous pouvons mieux faire. D’autres initiatives sont envisageables pour l’apprentissage des langues.

Avec MM. Paasch et Vandenbroucke, nous organisons déjà des échanges d’élèves pendant les vacances pour les préparer à l’immersion dans l’enseignement secondaire ou à l’apprentissage de la première langue étrangère. Selon moi, nous n’exploitons pas assez les ressources des autres Communautés. Je perçois, tant chez M. Vandenbroucke que chez M. Paasch, une volonté absolue d’avancer dans ce dossier. Bien entendu, la Communauté germanophone comptant un nombre plus limité d’enseignants, elle ne souhaite pas voir ses effectifs amputés. Toutefois nous avons conclu avec elle un accord de partenariat : des enseignants germanophones pourront ainsi poursuivre leur carrière professionnelle dans l’enseignement francophone, et inverse ment, sans perte d’ancienneté. Cet échange n’est donc limité que par le nombre d’enseignants disponibles. En réponse à la question de Mme Pary-Mille, l’inscription en immersion a lieu en troisième maternelle, première primaire et première secondaire, tel que fixé par le décret de 2007. Aucune dérogation n’est théoriquement possible. Toutefois la circulaire du 13 février 2008 a fait l’objet d’interprétations différentes par des chefs d’établissement qui ont pris des inscriptions en dehors des périodes prévues. L’administration a adressé aux écoles une circulaire précisant la législation. À titre transitoire et afin de ne pas mettre des parents et des élèves en difficulté lors de la rentrée scolaire, le maintien des inscriptions déjà effectuées a été autorisé.

Effectivement un problème se pose aux élèves qui intègrent le circuit. Pour garantir la qualité du système, une épreuve doit être organisée. Nous réfléchissons à l’élaboration d’un tel examen d’évaluation. Il me semble toutefois évident qu’un élève anglophone doit pouvoir s’inscrire en immersion anglaise en deuxième ou en troisième primaire à la suite d’un déménagement, tout comme un néerlandophone en immersion néerlandaise. Le principe fondamental est d’assurer la continuité pédagogique. Nous ne devons pas transiger sur ce point. Je reconnais qu’il faut pouvoir agir dans certains cas. Je suis donc à votre disposition pour rechercher avec vous une solution cohérente tant pour les élèves que pour l’immersion.

M. Carlo Di Antonio (cdH).

Il est impératif de préserver la qualité de l’enseignement, ce qui nous amène à nous interroger sur les moyens dont disposent les communes. Il faut examiner la situation particulière des communes où l’enseignement fondamental ne peut pas être suffisamment aidé et où les projets d’immersion sont donc pénalisés. Est-il normal d’avoir une immersion à deux vitesses en Communauté française ?

M. Christian Dupont, ministre de l’Enseignement obligatoire.

Cette question se pose également pour la capacité communale d’engager sur fonds propres un maître complémentaire, que ce soit ou non pour l’enseignement en immersion linguistique. Il s’agit d’un contrat passé entre les communes et leur pouvoir de tutelle. Vous devriez donc plutôt discuter de ce problème avec le ministre de tutelle. Je veux bien que l’on accorde des dérogations, mais il est un peu facile pour moi de le dire. . .