Député C. Di Antonio (cdH).

Il y a quelques semaines, les Ministres européens de la Recherche ont approuvé la mise en place d'un partenariat public-privé pour soutenir le développement d'une filière hydrogène compétitive en Europe. A cet effet, près d'un milliard d'euros sera accordé pour ce programme en six ans dans le but de stimuler la recherche sur l'hydrogène et la pile à combustible.

Cette Initiative technologique conjointe (ITC) sera financée par l'Europe à hauteur de 470 millions d'euros et les entreprises qui piloteront ce projet de recherche devront apporter un montant équivalent.

L'objectif de cette ITC doit permettre à l'Europe de prendre la tête du marché mondial des technologies de l'Hydrogène et de permettre une disponibilité commerciale entre 2010 et 2020.

Ce programme vient à la suite d'un rapport scientifique nommé « HyWays » chargé d'étudier les incidences sur l'économie et l'environnement à grande échelle de l'hydrogène.

N'ayant que très peu d'informations sur ce rapport, il semblerait tout de même que l'hydrogène soit une des options les plus réalistes pour améliorer la viabilité économique et écologique des transports.

Il permettrait de découpler la demande en énergie et en ressources et autre avantage important, il pourrait permettre de stocker temporairement l'énergie facilitant ainsi l'introduction à grande échelle des énergies renouvelables dans les systèmes de production d'énergie.

Ce dernier aspect est tout particulièrement intéressant. En effet, l'hydrogène peut être produit à partir de n'importe quelle source d'énergie comme la biomasse, le vent, l'énergie solaire et les combustibles fossiles propres. Il peut à la fois être converti en électricité et en chaleur avec un rendement élevé sans émissions indésirables puisqu'il est dépourvu de carbone.

En découplant la demande et les ressources, il permettrait de laisser à chaque Etat membre de l'Union Européenne le choix de ses propres sources d'énergie.

L'Espagne par exemple vient tout juste d'inaugurer un réacteur solaire baptisé Hydrosol 2 pour produire de l'hydrogène par hydrolyse.

Madame la Ministre a-t-elle plus d'informations sur, d'une part, cette ITC et, d'autre part, sur les conclusions du rapport HyWays ?

Quelles implications pourraient tenir notre Région dans ces innovations technologiques ?

Des projets sont-ils déjà en cours ?

Mme. la Ministre M.D Simonet.

Je remercie l'honorable Membre de sa question qui évoque un problème majeur relatif à notre avenir. La réponse à votre question relève à la fois du Ministre en charge de l'énergie et du Ministre en charge de la recherche scientifique et technologique. C'est à ce dernier titre que je vais y répondre.

La problématique de l'hydrogène a en effet été évoquée en détail à l'occasion du projet HyWays, cofinancé par l'Union européenne à l'occasion du sixième programme-cadre. Le rapport HyWays, phase I, est accessible sur Internet : HyWays_external_Document_02FEB20061.pdf .

Parmi les conclusions de ce premier rapport, je retiens les éléments suivants :

- jusqu'en 2030, les combustibles fossiles seront sans doute la source dominante de production d'hydrogène en Europe, tandis que l'hydrogène issu de sources renouvelables prendra progressivement sa place;

- l'introduction sur le marché de véhicules dotés de pile à combustible dépendra en grande partie des succès atteints dans la réduction des coûts du système. A un niveau inférieur, le prix de la production et de la manutention d'hydrogène, le prix du brut et l'internationalisation des dégâts environnementaux détermineront la pénétration de l'hydrogène dans le système énergétique;

- une grande incertitude persiste en ce qui concerne l'allure à laquelle l'hydrogène pourra pénétrer le marché, ainsi que les investissements requis pour amener les technologies d'hydrogène sur le marché;

- l'introduction de l'hydrogène dans le système énergétique européen causera des modifications substantielles dans la structure de l'emploi, particulièrement dans le secteur automobile. L'impact global sera positif ou négatif, en fonction des efforts de l'Europe pour consolider ou améliorer sa position dans le marché automobile.

Le rapport final du projet HyWays, publié en février 2008, est également disponible sur Internet : HyWays_Roadmap_FINAL_22FEB20081.pdf.

Ce rapport souligne, comme l'honorable Membre l'indique dans sa question, tout l'intérêt de l'hydrogène : « L'hydrogène est un transporteur d'énergie avec un contenu de carbone nul. Comme l'électricité, l'hydrogène peut être produit à partir de toutes les ressources d'énergie, telles que la biomasse, l'énergie éolienne ou solaire, l'énergie nucléaire et les combustibles fossiles. Il peut être converti en puissance ou en chaleur avec une grande efficacité et des émissions nulles, tout particulièrement dans les cellules à combustible. ». D'autres avantages sont encore évoqués. Deux grands défis doivent toutefois être affrontés :

1° le coût de l'utilisation finale de l'hydrogène, tout particulièrement pour le transport routier, doit être réduit considérablement. Un accroissement majeur de la R&D est nécessaire dans ce domaine;

2° l'agenda politique doit prendre en compte le déploiement de l'hydrogène et de son utilisation.

Dans ses recommandations, le rapport final de HyWays suggère

- un cadre de soutien technologique spécifique à l'hydrogène et ses applications ; - un planning des infrastructures ; - des synergies avec d'autres options comme, par exemple, les véhicules hybrides ; - des incitants européens à la R&D dans ce domaine ; - des programmes de formation ; - des partenariats public/privé au niveau européen.

Dans la foulée de ces travaux, la Commission européenne a suggéré la création de l'entreprise commune "Piles à combustible et hydrogène". Dans son projet de règlement, la Commission signale que « le défi technologique des piles à combustible et de l'hydrogène est d'une grande complexité et d'une grande ampleur, et les compétences techniques sont fortement dispersées. Par conséquent, afin d'atteindre une masse critique en terme d'échelle des activités, d'excellence et de potentiel d'innovation, il convient de s'attaquer à ce défi d'une manière ciblée et cohérente à l'échelle de l'UE. Cette situation, et la contribution potentielle des piles à combustible et de l'hydrogène aux politiques communautaires, notamment en matière d'énergie, d'environnement, de transports, de développement durable et de croissance économique, dictent l'approche de l'Initiative Technologique Conjointe dans ce secteur. ? L'objectif de l'ITC devrait être poursuivi en mettant en commun des ressources des secteurs public et privé afin de soutenir les activités de recherche et développement en vue d'accroître l'efficacité globale des efforts de recherche européens et d'accélérer le déploiement des piles à combustible et de l'hydrogène. » Le premier article du règlement de l'ITC spécifie que « aux fins de la mise en ouvre de l'initiative technologique conjointe sur les piles à combustible et l'hydrogène, une entreprise commune est créée pour une période allant jusqu'au 31 décembre 2017. ».

Sous la précédente législature, la Région wallonne a financé un projet de recherche sur les piles à combustible, mais les résultats espérés n'ont pas été atteints. Plus récemment, le thème de l'hydrogène et des piles à combustible a été proposé parmi ceux du premier programme mobilisateur du Plan Marshall, destiné aux entreprises. Nous voulions en effet promouvoir des actions de R&D dans des domaines de grand potentiel et peu ou pas exploités en Région wallonne. L'importance du thème de l'hydrogène avait été peu auparavant soulignée par le conseil de sciences appliquées de l'Académie Royale Belge ("Hydrogen as an energy carrier", Royal Belgian Academy Council of Applied Science, Avril 2006). Bien malheureusement, aucun projet n'a été présenté.

Le thème de l'hydrogène et des piles à combustible sera à nouveau proposé dans le second programme mobilisateur Marshall qui fera incessamment l'objet d'un appel à projets. J'espère vivement que des entreprises déposeront des projets dans cette discipline et que leur réalisation permettra à ces entreprises de participer à l'Initiative Technologique Conjointe qui fait l'objet de l'intervention de l'honorable Membre.