M. Carlo Di Antonio (cdH).

De nombreuses études fleurissent chaque jour sur l'évaluation des biocarburants de première génération du type Diester ou éthanol ainsi que les perspectives qui pourront être offertes par les biocarburants de seconde génération, dits agro-carburants. Tous s'accordent à dire, à bon escient, que la maîtrise des émissions de C02 est devenue une préoccupation durable et l'occupation de l'espace par les productions végétales sources de biocarburants devient un enjeu crucial.

L'efficacité et l'intérêt de ce type de produits n'apparaît, pas aussi évident, ni partagé, qu'au moment où ces mesures ont été prises. Ainsi, un hectare de colza produit 1.500 litres de Diester de première génération et un hectare de betteraves permet d'obtenir 2.500 litres d'éthanol de première génération.

La quantité de gaz à effet de serre émise par les biocarburants dépendrait en grande partie de la manière dont ils sont produits, car leur fabrication consomme non seulement beaucoup d'énergie, mais également de nombreux engrais qui peuvent libérer de l'oxyde d'azote jusqu'à trois cent fois plus nocif que la gaz carbonique. Avez-vous une évaluation d'impact plus précise en ce domaine ? Si oui, pouvez-vous me communiquer ces résultats ?

Plusieurs scientifiques internationaux s'accordent en démontrant que les deux filières de carburants verts les plus protecteurs ou plutôt les moins nocifs pour l'environnement seraient la canne à sucre, dont la tige peut être brûlée pour opération de distillation, et la lignocellulose qui caractériseraient les agro-carburants de prochaine génération. Le miscanthus, dont les caractéristiques le rapprochent de la canne à sucre, aurait en moyenne un rendement de 10.500 litres d'éthanol à hectare et fait l'objet de recherches poussées dans notre Région. Avez-vous plus de renseignements sur les études réalisées ? Quelles mesures vos services entendent-ils prendre pour favoriser les biocarburants de seconde génération ?

M. Benoît Lutgen, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme.

La question que vous évoquez est de première importance et extrêmement complexe. Il existe une multitude d'analyses et d'études qui évaluent le bilan énergétique et environnemental de la production de biocarburants. Toutes fixent des hypothèses de calcul différentes et elles donnent une variation extrême de résultats. Si l'on sélectionne des études avec des conditions proches de la production belge, ce sont des réductions de 45 % des émissions de gaz à effet de serre que permettrait d'obtenir le biodiesel. Pour le bioéthanol, la réduction devrait être comprise entre 46 et 71 %.

Même s'il y a divergence des résultats, il y a une ligne directrice que l'on retrouve dans une large majorité de ces rapports : les biocarburants sont une alternative limitée mais réaliste qui constitue actuellement la seule source d'énergie renouvelable concrète à court terme. Mais il est clair que c'est une solution partielle qui n'est valable que : • si elle est complétée par des encouragements à utiliser mieux et moins de carburant dans les transports routiers ;

• si elle est conditionnée à la production ou à l'importation de biocarburants qui présentent un bilan énergétique et environnemental positif.

En Région wallonne, les deux sites importants ont particulièrement veillé à ces bilans :

• à Feluy, l'unité de biodiesel utilise de la vapeur résiduelle d'autres process dans l'usine ;

• à Biowanze, 70 % minimum de l'énergie nécessaire à l'usine est produit avec les sous-produits des matières premières utilisées pour la production. Ce procédé est calqué sur celui de la valorisation de la tige de canne à sucre.

À propos de canne à sucre, je souligne que les multiples études traitant des bilans environnementaux se gardent bien de s'étendre sur les revenus et conditions de travail des agriculteurs et des ouvriers qui permettent d'obtenir à si bas prix de l'éthanol au départ de canne à sucre.

Je tiens également à préciser qu'à Biowanze, rien n'est perdu puisque le coproduit issu de la distillation sera séché et vendu comme base d'aliment pour le bétail, ce qui réduira d'autant la pression sur le prix des céréales qui, actuellement, sont utilisées en majorité pour alimentation du bétail.

Je tiens à votre disposition une analyse récente réalisée par le facilitateur wallon pour les biocarburants. Par ailleurs, des essais d'implantation de la culture de Miscanthus ont été développés au milieu des années nonante dans le cadre d'un programme européen FAIR sur le site de la ferme expérimentale du Centre des Technologies Agronomiques de la Communauté française à Strée (Huy). Les essais en petites parcelles ont surtout visé la maîtrise de la phytotechnie de la culture, le désherbage, le choix des cultivars et la fumure.

Sous nos latitudes, le potentiel de rendement escompté varie de 15 à 20 tonnes de matière sèche à l'hectare, soit une production potentielle de 4.500 à 6.000 litres d'éthanol, ce qui n'est pas une solution optimale. Plus directement, le Miscanthus peut être utilisé pour produire des pellets, ou tel quel pour la combustion après hachage de la récolte. Des développements sont aussi à attendre pour la production de pâte à papier et de panneaux pour l'isolation des bâtiments.

Le développement de biocarburants de seconde génération, qui visent à valoriser l'entièreté de la plante et atteindre une efficience proche des 70 %, nécessite encore des recherches importantes. Il y a quelques semaines, j'ai approuvé un projet qui réunit cinq départements du Centre wallon de Recherches Agronomiques à Gembloux. Sept cent septante milles euros seront consacrés pendant trois ans à définir très concrètement les différentes étapes du process visant la séparation des principaux constituants des cellules de plusieurs type de végétaux, l'hydrolyse enzymatique de la cellulose et des hémicelluloses et enfin la fermentation des sucres simples résiduaires en alcool.

Dans le cadre de cette étude, un éco-bilan complet sera réalisé pour chacune des plantes étudiées.

M. Carlo Di Antonio (cdH).

C'est un secteur passionant où il convient de trouver la plante idéale. À ce titre, la canne à sucre a un rapport intéressant, mais le problème reste lié à son transport.