SÉANCE DU 10 MAI 2006

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre-Président,
Chers Collègues,

Je serai bref, puisque mes prédécesseurs à cette tribune ont déjà largement traité des diverses facettes du sujet qui nous préoccupe aujourd’hui. Pour ma part, je tenais principalement à m’exprimer sur le nouvel objectif « Convergence », qui remplace l’ancien Objectif 1 et qui, en Belgique, concerne uniquement la province du Hainaut.

On l’a assez dit, le Hainaut bénéficie ainsi du statut de région en « phasing out statistique », son PIB par habitant étant hélas toujours inférieur à la moyenne de l’Europe des 15 –mais supérieur à celle de l’Europe élargie à 25. Il semble assez clair qu’il s’agit là d’une dernière « rallonge » et que le Hainaut ne pourra plus prétendre à ces fonds de « convergence » lors de la prochaine programmation, en 2013. Il est donc essentiel que les projets qui y seront financés par l’Europe et qui devront être menés à bien à partir de l’année prochaine soient au final de véritables succès et qu’ils aient un impact structurel réel sur le tissu économique hennuyer, un impact à même d’enfin assurer le redécollage de cette province.

En effet, la fois prochaine, il n’y aura plus de « phasing out du phasing out du phasing out… » comme certains ont pu décrire le sursis que le Hainaut a obtenu lors de la difficile confection des perspectives financières européennes l’an dernier. Nous sommes alors passés bien proche de perdre ces montants si nécessaires au redéploiement de notre région, les nouveaux États membres étant incontestablement encore plus en difficulté que nous le sommes. Il n’empêche, c’est très certainement la dernière fois que le Hainaut bénéficiera d’un support financier européen de cette importance et il a besoin de se relever au plus vite. Il nous faut donc relever le défi et préparer l’avenir, pour que nous puissions enfin nous passer de ce support européen –l’objectif fondamental n’étant certes pas de pouvoir obtenir tel ou tel fonds mais bien davantage de ne plus être « admissible » à ces aides… et tributaires de celles-ci.

Pour ce faire, il faut bien évidemment arrêter les divers saupoudrages géographiques, politiques, sectoriels qui ont tant nui aux programmations précédentes. Des opérations et des projets ponctuels, tout aussi prestigieux qu’ils puissent être, n’ont pas résolu auparavant, et ne résoudront en rien dans l’avenir, les problèmes socio-économiques fondamentaux du Hainaut, bien au contraire. À l’instar du Plan Marshall, il va falloir faire des choix et concentrer nos moyens et nos énergies sur des projets réellement structurants. C’est uniquement de cette manière que nous parviendrons à maximiser les effets de levier propres aux fonds européens. Il faut cibler les interventions sur quelques domaines prioritaires, directement associés aux politiques menées dans le cadre du Plan Marshall : pôles de compétitivité, agence de stimulation économique, rationalisation du nombre d’opérateurs, renforcement de la recherche et de l’innovation, formation professionnelle, etc. Dans le Hainaut (comme dans toute la Wallonie) il va bien évidemment falloir que les fonds structurels et les actions initiées par le Plan Marshall et les 4 PST (Plans stratégiques transversaux) soient réellement complémentaires et se renforcent mutuellement.

En agissant de la sorte, nous ne ferions d’ailleurs qu’aller dans le même sens que la Commission européenne. En effet, celle-ci souhaite fort logiquement que les fonds structurels s’inscrivent clairement dans la réalisation de la « Stratégie de Lisbonne » pour plus de croissance, de compétitivité et d’emplois, basée entre autres choses, sur le soutien à la recherche, au développement du « capital humain », à l’innovation, à la formation, à l’insertion sociale, à la promotion de l’esprit d’entreprise…

Toutefois, il ne suffit pas de partager cette vision des choses, il importe aussi d’aller vite. En effet, nous faisons face à un calendrier très serré. La Belgique sait quels montants vont lui être alloués par l’Europe, mais il nous faut encore partager tout cela entre les trois régions (et on sait la tournure que ces négociations peuvent prendre dans notre pays…). Ensuite, la Belgique (et donc chacune des Régions) devra remettre à la Commission son programme opérationnel d’action au plus tard en septembre prochain. Enfin, les projets concrets devront pouvoir être démarrés dès le 1er janvier 2007. On le voit, le temps est compté !

Dans ce contexte, il n’y a qu’un seul montant qui soit déjà parfaitement connu et qui ne changera plus, c’est celui qui concerne l’ex-Objectif 1, soit le financement accordé au Hainaut dans le cadre du nouvel objectif de « convergence » : c’est-à-dire 577 millions €.

Cette enveloppe ne changera plus et n’est pas concernée par les négociations toujours en cours. Dès lors, rien n’empêche qu’on essaie déjà d’avancer le plus possible, « de prendre de l’avance » là où on le peut, d’établir quels types de projets concrets pourraient voir le jour dans le cadre de cet objectif de « convergence » en province de Hainaut. Cela donnerait un signal fort à l’ensemble des intervenants hennuyers qui veulent participer d’une manière ou d’une autre au redressement de leur province et de leur Région.

Je suis confiant, Monsieur le Ministre-Président, que vous partagez largement ma vision des choses dans ce dossier. Et je vous remercie d’avance pour vos précisions et explications.

M. Elio Di Rupo, Ministre-Président du Gouvernement wallon.
Je vous remercie pour cette interpellation et son contenu. De plus, je salue mon Collègue, M. Jean-Claude Van Cauwenberghe, pour le travail qu'il a accompli tout au long de la phase préliminaire précédent la décision des instances européennes. Qui plus est, le Gouvernement a beaucoup travaillé à la préparation de ces sommets ainsi que la nouvelle programmation qui s'étendra de 2007 à 2013. En décembre, un décret-cadre faisait état de futurs documents de référence. Il tenait compte de la réalité et des projets de règlements européens selon des principes de cohérence et de concentration.

La cohérence concernait les différents programmes européens et les objectifs stratégiques de la Région wallonne. Le but était d'amplifier et d'aider la politique wallonne notamment à travers les programmes FEDER et FSE, ainsi que la coopération territoriale. La concentration se traduira, d'une part, par un ciblage sur les actions pour lesquelles l'effet de levier des fonds européens est le plus important et dont l'efficacité est démontrée. Cela implique une concentration budgétaire des moyens sur un nombre limité de mesures. Pour cela, il est proposé de concentrer les efforts sur des projets à forte visibilité, porteurs d'ambition et sur lesquels une mobilisation des acteurs locaux génère une dynamique nouvelle. D'autre part, il s'agira d'un ciblage sur les zones géographiques qui rencontrent les difficultés les plus importantes, et en particulier sur les pôles urbains dont le rôle moteur du développement doit être restauré pour ses effets d'entraînement et de diffusion. Sur cette base, le Gouvernement a précisé que le cadre global d'intervention des fonds européens sera articulé autour de quatre programmes stratégiques transversaux. Il conviendra, en effet, de cibler les actions pour lesquelles la valeur ajoutée communautaire et l'effet de levier additionnel sont démontrés. Par conséquent, le cadre général sera structuré en quatre axes qui devront être déclinés en fonction de leur spécificité.

Le premier axe viserait le développement de l'esprit d'entreprise et de l'entreprenariat, de même que le soutien à la création d'entreprises génératrices d'emplois, le tout, via un ensemble cohérent de mesures qui s'appuieraient sur les politiques développées en la matière au niveau wallon, et les amplifieraient.

Le deuxième axe serait celui du développement du capital humain, des connaissances, des savoir-faire et de la recherche. Les interventions seraient concentrées sur la formation professionnelle, l'emploi, l'enseignement, l'innovation non-technologique et les TIC. Les interventions de R&D et les innovations technologiques seraient concentrées au bénéfice des entreprises, avec une attention particulière pour les PME.

Le troisième axe concerne l'inclusion sociale.

Le quatrième axe s'intéresse au développement territorial équilibré et durable. Seraient développées au sein de cet axe des mesures de renforcement de l'attractivité des zones visées, en soutien au développement d'activités économiques. Il pourrait s'agir d'assainissement des friches industrielles et urbaines, d'aménagements d'infrastructures d'accueil des entreprises et d'amélioration de l'accessibilité des pôles de développement, ou encore d'actions en matière de qualité de l'environnement. Les actions spécifiques en matière de politique urbaine seraient principalement concentrées au sein de cet axe.

Une même architecture sera retenue pour les programmes opérationnels développés dans le cadre des objectifs «convergence» et «compétitivité régionale et emploi». Cela permettra de réaliser à la fois des actions transversales Sur l'ensemble du territoire Wallon et des projets spécifiques aux besoins des différentes zones.

En ce qui concerne le futur Objectif 3, étant donné l'importance croissante de la dimension internationale, le Gouvernement a souligné la nécessité de concevoir les programmes et actions de l'objectif de coopération territoriale en réelle complémentarité des programmes «convergence» et «compétitivité régionale et emploi».

Mais, il est évident que les priorités des régions partenaires devront aussi être prises en considération. Les bases stratégiques sont donc posées. Dans ce cadre, je peux vous annoncer qu'une étude a été commandée à l'ULB pour l'élaboration des projets du volet wallon du cadre de référence stratégique nationale et des programmes opérationnels des Objectifs 1 et 2. La mission était d'établir un diagnostic socio-économique de la Région. Il s'agit aussi d'analyser les forces et les faiblesses des réalisations passées et présentes dans les fonds structurels. Enfin, il est surtout question d'établir les priorités thématiques et territoriales.

Le texte du cadre de référence stratégique national sera terminé dans le courant de ce mois et ces documents seront soumis à un comité scientifique partenarial composé de l'IWEPS et du CESRW. Après une première lecture en Gouvernement, la consultation partenariale réglementaire sera lancée. Les textes passeront alors en seconde lecture avant l'envoi à la Commission européenne. Il s'ensuivra une période traditionnelle de négociations avec la Commission. Le but ultime est de voir les différents documents approuvés par la Commission europénne en début de l'année 2007 afin de ne pas perdre de temps pour le lancement de la nouvelle programmation. Toutefois, nous sommes dépendants du calendrier de la Commission et du Parlement européen en ce qui concerne l'adoption officielle des réglements et des orientations stratégiques communautaires. De ce calendrier dépendra l'approbation des programmes opérationnels.

Dans ce cadre, diverses réunions de travail devront encore se tenir dans les prochaines semaines à l'initiative de la Ministre Moerman. Enfin, j'aimerais souligner que le Gouvernement a souhaité que le mode de sélection de projets établi pour la période actuelle soit reconduit. En effet, le Gouvernement veut des projets valables, intiateurs, structurants. Leur sélection sera définie par des critères de sélection ciblés pour chaque mesure et sur l'examen des projets par une Task Force indépendante. Cette dernière assurera la cohérence des actions cofinancées avec la politique mise en oeuvre au niveau wallon. Elle sera animée par un consultant extérieur et composée de représentants du monde universitaire, spécialisés en développement régional, ainsi que des représentants du monde industriel.

J'en termine, en affirmant que la gestion des fonds structurels européens en Région wallonne est animée, comme l'ensemble de la politique du Gouvernement, de la même volonté de collaborer à l'amélioration substantielle de la Wallonie.